Giovanni lutte seul contre les korrigans

Septembre 998.

Giovanni termina rapidement sa prière pour la petite Frotberga Perred qu'il venait de baptiser. Encore une fille, la troisième à naître cette année sur leur île. Les paysans commençaient à parler d'une malédiction en rapport avec le cercle de fées que personne n'osait détruire. On racontait qu'aucun garçon ne naîtrait dans le pays tant que l'église se tiendrait debout aux côtés du cercle.

Giovanni ne pouvait rien faire pour empêcher de telles rumeurs de se répandre, et il ne pouvait certainement pas ordonner la destructions de ces pierres dans le bois de Pradvael. Les paysans lui étaient encore hostiles pour la plupart, il ne voulait pas voir s'éloigner ceux qu'il avait réussi à convertir.

Il repensa à Dub Lemna, comme souvent lorsqu'il était seul. Attendait-elle une petite fille, elle aussi ? Nul ne le saurait jamais. Il ne pouvait plus rien pour cette pauvre femme morte dans l'ignorance la plus totale. Seuls son mari et les Perred étaient présent à son enterrement. Elle ne semblait pas s'être fait beaucoup d'amis durant ces quelques années passées à Pradvael.

Giovanni songea que le temps était encore assez doux et qu'il pourrait aller se recueillir quelques temps au cimetière. Le vent s'engouffrait dans le clocher de l'église et les derniers rayons du soleil faisaient briller ses vitraux. L'île était toujours silencieuse à la nuit tombée, si l'on faisait exception du bruit de la mer et de ce vent incessant. Giovanni n'arrivait toujours pas à s'y habituer et était réveillé plusieurs fois par nuits à cause de ces bruits inquiétants.

Il aperçut la tombe solitaire de Dub Lemna qu'il avait fleuri lui-même, puisque son époux ne semblait pas s'en préoccuper. Peut-être n'était-elle pas mort de façon naturelle. Dwyai avait trouvé beaucoup de sang dans la maison d'Affiath. Peut-être trop de sang...

Et si Affiath avait provoqué la mort de Dub Lemna ? Alors l'absence d'héritiers dans tout le royaume n'était rien d'autre qu'un châtiment divin contre un peuple qui ne punissait pas ceux qui détruisaient la vie que le Seigneur avait créée.

Mais comment pouvait-il penser une chose pareille d'un homme qui lui avait paru si attristé lors des funérailles de son épouse. Et s'il l'avait tuée, il l'aurait sûrement confessé. Ce vent altérait décidément trop ses idées. Il irait prier dans l'église jusqu'au lendemain matin. Ses idées seraient alors peut-être un peu plus claires et il jugerait peut-être moins facilement ses pairs.

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