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Le Royaume de Pradvael
20 décembre 2009

Pétronille dissimule ses larmes

Octobre 998.

Pétronille avait attendu la réponse de son coursier toute la matinée, mais personne ne venait. Après de longues heures sans réponse, elle commençait à désespérer d'obtenir de l'aide quand elle vit un petit bateau partir du port de Kervignag. La Duchesse venait lui porter secours.

1

« Votre Grâce, vous êtes venue ! »

« La Reine voulait m'accompagner, mais je lui ai ordonné de rester à Pradvael. Elle doit se remettre de la naissance de la Princesse Liutgarde. »

« Oh, je comprends. » répondit Pétronille, embarrassée. « C'est une bénédiction de vous avoir à Uzel pour quelques jours. Nous avons si peu de visites ces temps-ci. »

2

« Et je suis certaine que votre mari fait tout pour éviter de parler de la naissance, non ? Tous les mêmes, ces hommes ! Dès qu'il s'agit de concevoir les bébés, ils sont présents, mais lorsqu'il faut les faire naître, rien ne vaut l'expertise d'une femme ! »

« Croyez bien que je suis désolée de demander une chose pareille à une femme de votre rang. »

3

« Mais c'est la tradition, Pétronille. Une femme de la Cour doit être présente à la naissance de chaque enfant de la noblesse. Et de toute façon, Comtesse ou non, vous n'allez pas mettre au monde cet enfant toute seule ! »

« Voilà encore une chose que j'ignorais. » sanglotta Pétronille. « Et je n'ai aucune idée de ce qui va arriver. Si je n'arrivais pas à donner naissance au bébé ? »

« Allons, tout va bien se passer. » la rassura Dagena en posant sa main sur son épaule.

4

« Je suis désolée. Je … je n'arrête pas de pleurer ces derniers temps. Le moindre désagrément me fait éclater en sanglots. »

« Là, l'heure n'est pas aux pleurs, Pétronille, alors que vous allez donner la vie. » dit Dagena en séchant ses larmes. « La Reine n'était pas plus rassurée au moment de donner naissance et voyez comme la Princesse Liutgarde est en bonne santé maintenant. Venez, rentrons à l'intérieur. Je vous fais la promesse que tout va bien se passer. »

Pétronille s'était rendue de nombreuses fois au château de Kervignag et son château de pierres sombres et de bois lui faisait honte comparé au somptueux édifice de pierre du Duc. Elle décida de montrer à Dagena ce dont Foulques était le plus fier, espérant détourner son attention de l'état de leur château.

5

« Du vin d'Aquitaine ! » s'exclama la Duchesse. « Comment le faites-vous venir ? Le vin sur cette île est imbuvable, mis à part le cidre. »

« Le Roi avait envoyé mon mari en Francie pour se renseigner sur la mort du roi Hugues Capet. Il a fait un petit détour en Aquitaine en rentrant et a fait embarquer des dizaines de bouteilles sur son navire. »

Pétronille était heureuse de voir Dagena s'enthousiasmer de leurs possessions.

6

« Je suis sûre qu'après quelques verres de ce succulent vin, mon mari et le vôtre seraient définitivement réconciliés. » dit la Duchesse.

« J'ai appris que vous destiniez votre future fille à notre premier fils. C'est déjà un grand geste de la part de votre mari. Je n'ai jamais compris cette histoire d'hommage, mais je trouve triste de rester fâchés à ce sujet. Après tout, nous avons une bien petite Cour. »

7

Pétronille ne put entendre la réponse de Dagena tant la douleur dans son abdomen était intense. Elle sentit tous ses muscles se contracter.

« Mon Dieu, que se passe-t-il ? » s'écria-t-elle en se tournant vers la Duchesse.

8

« Vous allez être maman. » répondit-elle avec un grand sourire.

« Mais … qu'est-ce que je dois faire ? »

« Respirez, restez calme. Je vais envoyer quelqu'un faire bouillir de l'eau. »

« Restez-ici, Dagena, je vous en conjure ! » s'écria Pétronille avant de pousser un nouveau cri de douleur. « Le bébé est en train d'arriver ! »

9

« Si vite ? Pensez-vous réussir à vous rendre jusqu'à votre lit ? »

« J'ai trop mal, je ne pourrais pas monter les escaliers. »

« Dans ce cas, il va falloir vous allonger sur le sol. Tout va bien se passer, Pétronille, faites moi confiance. »

10

Pétronille ne supportait pas l'idée de donner naissance à son premier enfant dans une cuisine, comme une simple paysanne. Peut-être était-ce une leçon que lui envoyait le Seigneur. Peut-être ne serait-elle jamais vraiment une comtesse.

 

Au bout d'une dizaine de minutes seulement, un petit bébé naquit, ses pleurs résonnant contre les murs du château d'Uzel. Pétronille attendit impatiemment le retour de Foulques. Elle voulait absolument lui présenter le bébé et voir comment il réagirait.

11

« Ma mie, vous avez déjà donné naissance ? Vous auriez dû dépêcher un coursier pour venir me chercher ! Alors ? Présentez-moi ! »

« C'est … c'est une fille. » répondit-elle timidement. « Dame Mahaut, si vous permettez que je la nomme ainsi. »

« Impossible ! » rugit le Comte.

12

« Le … le nom ne vous plaît pas ? »

« Je m'en fiche complètement ! Qu'elle aille au diable, pour ce qui me concerne ! Vous deviez me fournir un héritier ! Le royaume n'avait pas besoin d'une fille de plus ! Donnez la à une servante pour qu'elle s'en occupe et revenez ici immédiatement. Vous me donnerez un héritier mâle, même si vous devez mourir à la tâche. »

Pétronille tourna le dos à son mari pour cacher ses larmes. Cette fois-ci, la Duchesse n'était pas là pour les sécher. Elle espérait seulement que la petite Mahaut n'aurait pas à pleurer trop souvent du manque d'amour de son père. Elle essaierait de l'aimer pour deux.

< Pétronille reste une paysanne

Affiath fait face à son destin >

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Commentaires
L
Je me doutais bien que Foulques réagirait ainsi...
Le Royaume de Pradvael
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